Présence à soi

Le processus de guérison d’une blessure émotionnelle (2)

pierre zen

La première partie de cet article se trouve ici.

Les sept étapes du processus de guérison

Il est intéressant d’avoir un aperçu du déroulement du processus de guérison d’une blessure émotionnelle, dès lors que, moyennant une certaine dose d’authenticité, il nous permet de situer où nous en sommes dans notre propre chemin de guérison et de développement spirituel.

En fonction de l’importance et de l’ancienneté de la blessure, le déroulement  de ce processus peut justifier d’être accompagné par un thérapeute. Volontairement, je ne donne pas tout le détail des prescriptions thérapeutiques. En effet, ce processus est trop délicat et ses répercussions sont trop importantes pour prendre le risque que certaines personnes tentent une automédication hasardeuse alors que l’aide d’un professionnel compétent eût été nécessaire.

De même, suivant les cas, le passage d’une étape à une autre peut être rapide ou, au contraire, nécessiter plusieurs séances espacées sur plusieurs mois.

  1. Admettre les faits et son statut de victime

Pour la personne blessée, il est tout d’abord important de reconnaître la réalité de ce qui s’est passé. Pour moins souffrir, certaines personnes se sont « suradaptées » à la situation en développant des mécanismes de défense qui, s’ils ont été salutaires un temps, finissent par devenir un obstacle à la guérison dès lors qu’on ne ressent pas le besoin de trouver une solution à un problème dont l’existence est occultée et niée.

Admettre la réalité permet de prendre conscience de son état de victime, de pouvoir dire : « oui, j’ai subi cela, oui, je suis une victime et j’ai le droit d’être reconnu comme telle ».  Il est également sain de pouvoir pointer du doigt le responsable.

  1. Emotions au moment des faits

La personne blessée se connecte aux émotions qu’elle avait ressenties au moment des faits et essaie de se laisser traverser par elles, de façon à leur permettre de se fluidifier à nouveau.

Ce sera aussi pour cette personne l’occasion de prendre conscience que si elle s’est tout un temps identifiée à sa blessure, elle n’est pourtant pas cette blessure et elle ne se définit pas uniquement  comme victime. Cette « dés-identification » à la blessure permet une prise de distance par rapport à l’émotion, ce qui permet d’en devenir observateur et d’en percevoir mieux les mécanismes.

Il est également intéressant de voir si la personne arrive à replonger dans l’émotion première ou reste bloquée dans des sentiments, dans la construction mentale qu’elle s’est fabriquée après coup, ce qui sera l’indice qu’elle n’est pas encore prête à lâcher l’histoire qu’elle s’est forgée pour se protéger.

Par peur de revivre la douleur engendrée par les faits blessants, nombre de personnes n’osent pas se laisser aller à revivre ces émotions. Pourtant, ce revécu sensoriel peut se faire en douceur. Ainsi qu’il est expliqué dans l’article relatif à la souffrance, nous ne souffrons que si nous offrons une résistance, si nous n’arrivons pas à lâcher-prise face à nos émotions.

Même si cela est très humain, il est d’une certaine façon paradoxal de craindre de revivre ces émotions douloureuses car, elles sont quand même ressenties quotidiennement en l’absence de guérison. D’une certaine façon, cela aboutit à continuer à souffrir de peur de souffrir à nouveau…

Pour cette étape, la Respiration consciente peut être d’une grande aide, dès lors qu’elle « ouvre la serrure » du corps émotionnel et facilite la reconnexion à ces émotions passées, tout en évitant le piège du mental qui aura tendance à éviter la confrontation ou à vouloir « récupérer » l’émotion.

  1. Émotions actuelles

La personne blessée se connecte à ses émotions actuelles à l’évocation des faits passés. S’il n’y a pas eu d’évolution entre l’émotion ressentie au moment des faits et l’émotion ressentie aujourd’hui, il est probable que la personne reste attachée à son histoire et n’est pas encore prête à passer aux étapes suivantes.

  1. Voir le contexte du responsable

La personne blessée prend conscience du contexte de vie, de l’histoire du responsable des faits, de façon à avoir un autre regard sur ce qui s’est passé. Cela ne signifie pas se mettre à la place du responsable, ni essayer de comprendre son point de vue, ni essayer de le comprendre ou de le justifier et encore moins de l’excuser. Il s’agit juste d’avoir une vision plus large des faits et de leur contexte.

Avant de passer à cette étape, il est crucial de s’assurer que la personne ait bien passé complètement les trois premières étapes, ce qui peut parfois prendre un certain temps de maturation, car si la phase « victime » est trop vite sautée au profit de la phase « responsabilisation », le risque est réel que la personne se sente responsable des événements et tombe dans la culpabilité, dont elle sortira très difficilement. Il est donc important de respecter le rythme de la personne et, plutôt que de lui imposer une autre lecture des choses, d’attendre que les prises de conscience viennent d’elles-mêmes, que la personne ait fait le chemin elle-même et soit mûre pour les étapes suivantes.

Il faut également éviter de confronter la personne avec l’idée que, par ce qu’elle est, elle ait pu être – même très partiellement – cocréatrice de ce qui lui est arrivé (exemple : la victime qui n’arrive pas à poser ses limites, qui ne sont donc pas respectées). En effet, ce type de discours, qu’il soit juste ou non, ne peut être entendu par une victime dont la guérison n’est pas totalement aboutie, et provoquera toujours une levée de boucliers, voire la rupture du processus thérapeutique.

   5.  Voir les avantages

La personne blessée prend conscience de ce qui, dans les événements subis, a permis de la créer telle qu’elle est aujourd’hui, dans ce qu’elle a de positif. Même si on sait que ces faits ont eu des répercussions négatives, l’idée à ce stade est de mettre le négatif entre parenthèses, et de se focaliser uniquement sur les retombées positives : qu’est-ce que la personne a forgé de positif dans ces épreuves, en termes de croyances, de constructions, de compétences développées… (exemple : le fait d’avoir eu un père absent a permis de développer une capacité d’autonomie et de débrouillardise).

La personne blessée réalisera qu’elle est « parfaite » et que si elle est une si belle personne, c’est aussi, entre autres,  grâce à ces événements qui étaient perçus comme uniquement négatifs. C’est une phase très délicate, à mener avec beaucoup de tact et de douceur car, l’idée qu’elle puisse avoir retiré des avantages de ces événements est de prime abord le plus souvent rejetée avec force par la personne.

Dans les cas où la victime a subi des épreuves qui l’ont emmenée à se dévaloriser (abus, dénigrement, rejet…), le massage tantrique est un magnifique outil pour retrouver l’amour de soi et de son corps, apprendre à sentir ses limites et à les faire respecter, ainsi que pour apaiser ses relations au sexe opposé.

   6.  Responsabilisation

Suite à la phase précédente, la personne blessée prend conscience que ce qui s’est passé correspond à une interaction qui a eu lieu entre deux personnes et qu’aujourd’hui, chacun peut reprendre sa place, se réapproprier totalement qui il est et assumer totalement sa vie. Cela permet à la personne de se détacher des faits subis et de leur auteur.

Cette phase permet aussi de prendre conscience des mécanismes de protection qui ont été mis en place à l’époque et qui sont devenus aujourd’hui un frein à notre développement.

Par ailleurs il n’est pas non plus toujours facile d’admettre que notre statut de victime peut nous avoir procuré des « bénéfices cachés » derrière lesquels il est parfois confortable de se retrancher.

Par exemple, certaines personnes réalisent que leur statut de victime leur permet d’obtenir du soutien et de l’attention et utilisent donc leurs blessures pour manipuler et contrôler les autres, souvent de façon non consciente. Si ces personnes souhaitent sincèrement guérir, il arrive donc que, sur un plan inconscient, elles soient d’une certaine façon attachées aux avantages que leur procure leur statut de victime, qu’elles souhaitent donc ne pas perdre. Cet attachement inconscient aux bénéfices cachés de la blessure est évidemment un frein majeur à la guérison, qu’il est possible d’emmener à la conscience par la pratique de la Respiration consciente par exemple.

Si le statut de victime peut constituer un piège « confortable » dans lequel on peut rester coincé, cette phase de responsabilisation permet d’en sortir, la personne cessant de subir pour redevenir acteur de sa propre vie.

   7. Acceptation et paix

C’est le dernier stade : la personne accepte de se retrouver elle-même, de reprendre son autonomie et d’être en paix avec elle-même.

Il n’est pas nécessaire que le responsable ait admis sa responsabilité face à la victime, ce qui est parfois impossible, vu que cela nécessiterait la collaboration active et volontaire du responsable, qui peut d’ailleurs être absent ou décédé au moment du processus de guérison. La personne s’étant totalement réappropriée elle-même, une quelconque relation au responsable n’est de fait nullement nécessaire pour que le processus de guérison puisse être mené à son terme avec succès.

De même, il n’est pas nécessaire de passer par un quelconque pardon à l’égard du responsable pour que le processus de guérison aille à son terme. Ainsi qu’il est expliqué dans l’article relatif au pardon, c’est une fois la blessure refermée que la personne blessée pardonne naturellement et sans effort dès l’instant où elle « lâche » le passé et n’y accorde plus d’importance excessive.

Didier de Buisseret

www.therapeute-debuisseret.be

N’hésitez pas à partager cet article, en le reprenant intégralement, sans modification ni coupure, et en citant sa source (www.presenceasoi.be)

4 commentaires pour “Le processus de guérison d’une blessure émotionnelle (2)

  1. Pingback: Le chemin de la guérison d'une blessure émotionnelle

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  3. Fraisse

    c’est assez étonnant comme encore aujourd’hui, il ne s’agit que des « victimes » dans les blessures émotionnelles, absolument rien sur les « abuseurs » « abuseuses », ce mot n’existe pas bien sûr, continuons de protéger la folie meurtrière patriarcale invisibilisée, au nom de la loi symbolique du Père , Sainte et inattaquable, devoir d’obéissance oblige pour le maintien de l’ordre … et pourtant ces « abuseurs », appelés boureaux dans le cercle de Kartman , où les victimes sont un rouage du mécanisme, et non un fait isolé comme c’est exprimé la plupart du temps, ces « abuseurs » sont dans une extrême souffrance, et aussi de nombreuses institutions dont ils.elles dépendent….
    c’est un long débat qui est hors sujet ici, c’est ce qui me vient à cette lecture, immenses gratitudes d’offrir à réfléchir sur sur des thèmes sensible et aussi vieux que le monde,

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